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Avec :
Janel Tsai (la mère) - Nina Ye (la petite sœur – la gauchère) - Shi-Yuan Ma (la grande soeur).
Shih-Ching Tsou est une productrice, réalisatrice et actrice américano-taiwanaise. Elle a co-réalisé le film Take Out (2004) avec Sean Baker (palme d’or à Cannes pour Anora en 2024) et a produit 4 de ses autres films. Elle est la compagne de Sean Baker.
Résumé :
Une mère divorcée et ses deux filles reviennent à Taipei pour ouvrir un petit restaurant de vente à emporter au cœur d'un marché nocturne de la capitale taiwanaise. On suit le quotidien de ces femmes qui racontent le poids des traditions, l’envie de modernité et la difficulté à exister entre les secrets, les non-dits et la peur du rejet social.
Analyse :
I-Jing, une petite fille espiègle et gauchère de cinq ans, découvre avec stupeur que sa main gauche est « la main du diable ». Une critique assénée par son grand-père. Elle va le croire car cette main lui joue de vilains tours : elle l’incite à voler, elle cause la perte d’un animal familier...
I-jing est entourée de sa mère, qui a le plus grand mal à joindre les deux bouts et de sa grande sœur, une jeune adulte qui souhaite s’émanciper. Les traditions ont effectivement la vie dure dans cette Taiwan à la fois conservatrice (le rôle prépondérant des hommes, les différence marquée entre les classes sociales) et moderne (les femmes « prolétaires » travaillent, un déluge de néon illumine une ville très animée, sillonnée par les scooters).
Servi par un casting parfait et par un montage trépidant, le film montre la vie quotidienne de ces femmes qui luttent pour survivre : la mère tient un petit restau dans le marché nocturne de Taipei et doit rendre des comptes à son bailleur intransigeant. La grande sœur au caractère bien trempé travaille dans une échoppe et fait la bêtise de prendre son patron marié comme amant, sans protection contraceptive.
Le manque d’argent et les moyens d’en obtenir sont un des leitmotivs du film, sans qu’on tombe jamais tomber dans le pathos: demande de prêt auprès d’une mère qui n’aime que son fils, brouille avec les autres membres de la famille, appel à un prêteur sur gages, vol de jouets par la petite gauchère...
Le film dépeint également le gouffre entre plusieurs classes sociales. La réalisatrice, issue d’une famille traditionnelle, montre la vie petite bourgeoise des grands parents dans leur appartement cossu, alors que les protagonistes vivent dans un couloir exigu. Les tantes de la petite gauchère, installées dans la vie, vilipendent sa mère, toujours en quête d’argent. Sa grande sœur est confrontée à d’anciens amis devenus des étudiants aisés qui la dénigrent alors qu’elle trime dans sa boutique où le patron tente de l’exploiter. D’autre part, Johnny, le voisin du marché nocturne tente lui aussi de s’en sortir alors que les affaires vont mal.
Enfin, il y a les secrets de famille, révélés lors d’un dîner chic organisé pour les 60 ans de la grand-mère, avec nourriture à foison et karaoké. La réalisatrice a dit s’être inspirée de Secrets et mensonges de Mike Leigh à cet égard.
Mais l’amour, l’entraide et la débrouillardise combleront – pour un temps – les difficultés des protagonistes. Et de même qu’au début du film on voit l’exubérance colorée des images regardées par la petite fille dans un kaléidoscope, la fin montre la petite gauchère en train de danser sous une boule à facettes, ivre de joie, dans le marché nocturne. On ne l’oubliera pas, courant dans ce terrain de jeu magnifiquement filmé, plein de vie et de couleur.
Un film engagé, lumineux et trépidant.
Elina Cuaz
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