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Mati Diop, née en 1982, est une actrice et réalisatrice franco-sénégalaise. Elle est la nièce du réalisateur Djibril Diop Mambety. Comme réalisatrice, après plusieurs courts métrages dont l’un, Mille Soleils, est un hommage à son oncle, son premier long métrage, Atlantique, consacré à la jeunesse de Dakar qui émigre en mer au péril de sa vie, reçoit le Grand prix du jury à Cannes en 2019.
Résumé :
En novembre 2021, vingt-six trésors de l’ancien royaume du Dahomey quittent le musée du Quai Branly, à Paris, pour être rapatriés vers leur terre d’origine devenue le Bénin. Avec plusieurs milliers d’autres, ces œuvres avaient été pillées lors de l’invasion des troupes coloniales françaises en 1892 et sont restées de longues années au musée de l’Homme, au Trocadéro, puis au musée du Quai Branly avant que l’État français décide de les restituer au Bénin.
Analyse :
Autour de grandes caisses en bois s’affairent manutentionnaires et conservateurs, dans une ambiance qui tient autant du déménagement que du laboratoire, quand, soudain, s’élève une voie gutturale qui semble venir du fond des âges ; c’est celle d’une statue anthropo-zoomorphe du roi Ghezo qui va commenter son voyage en langue fongbé. Le cadre ultramoderne du musée du Quai Branly est soudain plongé dans la magie des nuits africaines. Mati Diop a choisi de filmer la restitution de ces œuvres sous ses aspects techniques et dans sa portée politique mais aussi en la plongeant dans une atmosphère poétique. Le film qui débute par l’emballage des œuvres se poursuit par leur transport en avion et leur installation à Cotonou, et se prolonge par un grand débat dans un amphithéâtre de l’université d’Abomey Calavi. Cette longue séquence d’échanges, parfois violents, entre de jeunes Béninois illustre les réactions que peut susciter dans la population locale la politique de restitution des œuvres d’art volées aux pays d’Afrique. Certains se réjouissent que des œuvres aussi symboliques rejoignent leur pays et qu’ils puissent retrouver dans leur musée des éléments essentiels de leur culture et de leur histoire, mais d’autres, à l’opposé, s’indignent du faible nombre d’œuvres restituées et y voient plutôt le symbole d’un colonialisme méprisant dont les traces sont encore trop présentes et visibles dans leur société. Cette réflexion politique se double d’un élément de fantastique qui fait toute l’originalité du film : outre les commentaires du roi Ghezo, les esprits des statues déambulent dans le palais présidentiel et dans la ville. Ce mélange de documentaire et de fiction (Mati Diop parle d’un « documentaire fantastique ») fait toute l’originalité de ce film et est sans doute ce qui a conduit le jury de la Berlinale 2024 à lui décerner l’Ours d’or, récompensant ainsi, pour la deuxième année consécutive, un documentaire, après Sur l’Adamant de Nicolas Philibert en 2023.
Jacques Champeaux
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