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Discours à l'occasion de la réception du jury œcuménique à Berlin, 2012

Savez-vous, quelle image se trouve sur le billet de cinquante euros ? Vous pensez sûrement à quelque chose avec un pont. Sans doute un symbole fort. Mais est-ce qu’il vous parle ?

Il y a quelques semaines, Umberto Eco a fait une proposition qui vaut la peine d’être discutée lors d’un festival du film. Il disait qu’au vu de la crise de la dette européenne et des ravages qu’elle fait parmi les hommes, il serait bon d’y représenter désormais les grands cinéastes. Umberto Eco cite Claude Chabrol, Roberto Rossellini et Fritz Lang. Le sage milanais n’admet pas l’argument que ces films ne feraient que rappeler quelques réalisateurs un peu fous. Nous connaissons tous des films que nous n’avons pas vus. C’est ici, au cinéma, que sont racontées les véritables histoires européennes. C’est ici que l’idée européenne prend vie.

Au cinéma, les Grecs ne font pas que danser le sirtaki. Ici, dans la salle obscure qui n’admet ni paroles creuses ni temps creux, l’Europe se raconte, celle qui se compose de multiples histoires, de perspectives et de points de vue divers, et qui néanmoins vise un but commun : transformer le monde à travers l’art, qui est plus et autre chose qu’une illusion. A travers de bons scénarios et des images fortes, les frontières de notre perception du monde se déplacent. Des fictions peuvent s’approcher davantage de la vérité que tous ces produits filmiques captés par des portables et transmis à nos rétines sans aucun filtre, et qui n’arrivent pourtant pas à pointer l’essentiel. C’est pourquoi un festival international du film peut faire plus pour la cohésion de l’Europe (et du monde) que des protocoles politiques. Pour le dire autrement : un cinéma remarquable sur le plan artistique, qui explore de nouvelles formes et de nouveaux modes de compréhension du monde, ce cinéma-là possède aussi une pertinence politique et éthique. L’Europe a beau avoir – encore – une monnaie commune, mais elle méprise son fondement culturel, dit Umberto Eco. C’est pourquoi il nous manque une monnaie symbolique commune qui résiste aux crises parce que tous ont envie qu’elle continue à se développer. Il faut que nous fassions à nouveau confiance à la culture européenne, c’est la seule chose qui nous reste, à part le souvenir de nos guerres.

Faire référence à nos racines culturelles reste sans impact aussi longtemps que ces racines ne désignent que le passé, imaginé comme âge d’or d’un Occident chrétien, ou plutôt judéo-chrétien comme le veut désormais un bon ton un peu gêné. Umberto Eco veut parler de l’avenir. Les vieilles images et histoires sont pour lui des histoires de survie pour aujourd’hui et demain. C’est pourquoi il questionne le répertoire des images et des histoires que nous pouvons raconter ensemble. Il fait appel à des scénarios qui donnent à l’Europe une vision et de l’espoir, qui démasquent tous les clichés mortifères qu’on veut nous faire passer comme sans alternative.

Il n’est donc pas gratuit que le maître de la postmodernité fasse appel aux racines du christianisme et au pouvoir salvifique des images que celui-ci crée. Ici, cinéma et Eglise se rencontrent, deux institutions à tort catégorisées comme démodées : elles ont leur avenir devant elles si elles remettent sans cesse sur le métier leur tâche de représenter par des images fortes une réalité autre. C’est pourquoi nous avons besoin de chrétien(ne)s engagé(e)s qui se passionnent pour le cinéma, comme les membres du jury œcuménique qui sont chez eux dans les deux univers. Des intellectuels et des artistes, des cinéastes et des gens d’Eglise devraient se réunir et rappeler à haute voix : non, ce n’est pas l’économie qui maintient l’Europe : « c’est la culture ! »

Petra Bahr

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